Dessinant directement sur les murs Dominique Lucci pose à la fois la question du rôle de l’art et de son support. A priori
ce dernier ferait penser que l’art appartient à une forme de décor : or
il n’en est rien. Ce qui fait trace a certes valeur de promenade mais
le décor tourne. Les structures qui ne se contentent plus d’un cadre
créent des divagations où se mêlent l’imaginaire et le réel en
d’étranges bestiaires et volutes plus ou moins végétales. La littéralité
de l’image devient poétique dans ce qui tient d’un jardin
d’acclimatation hors de ses gonds. Sur des trames majeures ou des
animaux plus ou moins fabuleux et déclencheurs de diverses dérivations
l’objectif n’est pas de nourrir du fantasme chez le regardeur. L’effet
captivant est comme rejeté en second plan.
Jouant de la présence et de l’absence, du plein et du vide, le dessin
propose un maillage d’une complexité là où le mur n’est plus une simple
aire de jeu : il engage et sur deux modes peut-être antagonistes liés
cependant à un même fil : celui du langage des lignes et celui de la
représentation. Et ce afin de déboucher sur de la béance là où parce que
la compacité se clôt, se décide ou plutôt « s’indécide »
(Derrida), l’artiste ne laisse d’autre issue que ce vide sur lequel sont
réunis les interstices d’un possible. Celui-ci demeure en énigme.
L’image est autant retour que capture. Elle est autant fermeture sur le
fantasme qu’ouverture sur une autre image, sur un autre inconnu. Lucci
le maintient en suspens : aigu et lancinant, gage d’espoirs mais de bien
des doutes aussi…
Jean-Paul Gavard Perret.
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mai 6, 2017
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